Cindy, voyante 2.0

Cindy a trente ans. Elle est voyante, médium, rebouteuse. La jeune femme a plus de sept mille abonnés sur sa page Facebook. Depuis son village d'Auvergne, elle lit l'avenir, contacte les défunts  et soigne de ses mains magnétiques les maux des autres, au risque  parfois de s'abîmer la santé.
http://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/cindy-voyante-2-0‌

Je reproduis cet article pour montrer ce qu'est la vie d'une voyante "moderne". Ses pouvoirs ont toujours les mêmes racines occultes. Sa vie personnelle est marquée par les dégâts habituels dûs à ces compromissions, si vous lisez l'article de près...

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Cindy est une sorcière, même si elle n’utilise pas beaucoup le mot, car là où elle vit, ça fait peur aux gens. Certaines personnes âgées dans son village de l’Allier la regardent avec méfiance et utilisent le mot comme une insulte. Elle se définit plus facilement comme voyante, médium ou magnétiseuse. Elle a deux chats et ses cheveux changent souvent de couleur – noir, violet, blond, rose – au fil de ses Live Facebook. C’est surtout une femme qui croit en ses intuitions, très active sur les réseaux sociaux et dans la vie. Elle aime se définir comme « une femme de son âge, une femme qui travaille ».

La naissance du « petit monde de Cinderella »

Les expériences paranormales de Cindy commencent pendant son adolescence. Elles se manifestent par le fait de sentir la présence des défunts, ou l’imminence de la mort, et par une fascination pour les vidéos d’exploration de lieux hantés. Elles culminent avec une expérience de mort imminente (EMI), qui aurait selon Cindy réveillé son don de médiumnité.

L’ex-conjoint de Cindy est un sorcier, ou plus officiellement, un “praticien occulte”. Il se rend dans des lieux hantés avec son pendule pour les nettoyer. C’est lui qui initie Cindy à l’usage du pendule divinatoire.

Cindy a décidé de monter son entreprise de voyance en se rendant compte de la pertinence de ses tirages de cartes. Tout y est passé : le numéro de SIRET, l’URSSAF, le statut d’auto-entrepreneuse… Elle ouvre une boutique à Dompierre-sur-Brêbre, aujourd’hui devenue un site internet, où elle propose divers produits en plus de ses consultations : pierres, bijoux, attrape-rêves, bougies et huiles, oracles et mêmes thés et théières.
Si la vente est passée en ligne, les consultations peuvent toujours se faire en présentiel, ou par téléphone. Cindy décrit son lieu de travail comme « un bureau normal », qui ressemble presque à un cabinet de psychologue. Pourtant, c’est officiel, Cindy est reconnue comme une cartomancienne, même si elle préfère le terme “voyante”, car elle n’utilise pas que les cartes.
Ses prédictions passent par des images ou même des symptômes physiques.

En plus de proposer des séances de voyance, Cindy soigne des maladies ou des problèmes comme le manque de confiance en soi, par l’imposition des mains. Par le passé, on aurait pu l’appeler une “rebouteuse”, mais aujourd’hui, on dirait plutôt “guérisseuse”.

Le rôle des réseaux sociaux

On l’aura compris : si la boutique physique a fermé, c’est à cause de la pandémie qui n’a pas épargné « le petit monde de Cinderella ». Néanmoins, l’activité de Cindy n’a pas été réduite à néant par le confinement, au contraire : la pandémie a suscité nombre de questionnements ed’inquiétudes dans la population, et de nombreuses personnes se sont ainsi tournées vers ses services.

Or, un aspect essentiel du travail de Cindy est la gestion des réseaux sociaux. Pour se faire connaître, elle tient une page Facebook où elle fait des lives, c’est-à-dire des vidéos en direct où elle tire les cartes pour répondre aux questions des spectateurs. Lors de chaque séance, ils sont entre cent et trois cents à assister à ses tirages. Elle organise également des concours pour faire gagner des cadeaux ou des séances de voyance gratuites. Être connectée lui a donc permis de garder un lien avec sa communauté et de l’élargir depuis 2020.

Mais les réseaux sociaux ont toujours un revers de médaille peu agréable. “Les gens n’ont pas de patience, pas de respect. Ils sont très angoissés.”, raconte Cindy. Elle est sans cesse sollicitée par des inquiets qui ne prennent pas en compte le fait que Cindy a également une vie personnelle à gérer. Vie personnelle qui, d’ailleurs, a bel et bien souffert de l’accélération de son travail pendant le confinement. Entre les enfants, la vie de couple et son équilibre personnel, Cindy peine à garder le cap. Sans cesse sollicitée sur les réseaux sociaux, l’épuisement l’a menée au burn out.

« Le fait d’écouter des histoires dramatiques, des problèmes du quotidien, ça pèse. On gagne sa vie comme ça, mais on perd aussi en santé, parce que c’est un travail très énergétique. Ma santé s’est dégradée : on récupère le mal des autres.” Cindy

L’autre problème des réseaux sociaux, et en particulier de TikTok, c’est la prolifération des charlatans qui font de la concurrence déloyale à Cindy et à ses collègues. Ils ne sont pas déclarés, ils arnaquent, extorquent des sommes astronomiques, et ne respectent pas la loi qui interdit de vendre des prestations ésotériques à des mineurs. A ce propos, l’INAD, l’Institut national des arts divinatoires, recense les plaintes pour escroqueries, et a pour but de moraliser la profession.