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À propos du film : L’exorciste du Vatican…

L’Exorciste du Vatican (The Pope’s Exorcist) est un film américain réalisé par Julius Avery (sortie le 10 mai 2023). Il s’agit d’une adaptation des mémoires An Exorcist Tells All de Michael Patrick Kaczmarek. Il met en scène Russell Crowe dans le rôle de Gabriele Amorth qui a été exorciste du diocèse de Rome de 1986 à 2016.

A propos de la bande-annonce du film : « L’exorciste du pape »
Communiqué de presse de l’Association internationale des exorcistes

Ces jours-ci, la télévision, les plateformes et les médias sociaux annoncent la sortie prochaine, en avril, du film L’exorciste du pape, réalisé par l’Australien Julius Avery. Le titre est déjà prétentieux en soi. La bande-annonce du film confirme, s’il en était besoin, non seulement sa qualité de splatter-cinema, véritable sous-genre du cinéma d’horreur, mais aussi son manque de fiabilité sur un sujet aussi délicat et pertinent.

Au centre du film se trouve la figure de Don Gabriele Amorth (1925-2016), exorciste du diocèse de Rome pendant trente ans, interprété par l’acteur néo-zélandais Russell Crowe, connu du grand public pour avoir joué dans le film Le Gladiateur, qui lui a valu un Oscar en 2001.

Après avoir visionné la bande-annonce, nous souhaitons faire quelques remarques, en attendant de voir et d’évaluer le film dans son intégralité lors de sa sortie en salle. Un communiqué plus approfondi suivra à ce moment-là.

Laissant de côté ce qui semble à première vue être une citation d’autres films (comme, par exemple, l’exorciste qui finit par être lui-même possédé), nous constatons tout d’abord que le célèbre acteur hollywoodien ne rappelle en rien, par son apparence, mais surtout par ses manières, le profil humain et sacerdotal de Don Amorth, dont les mémoires (Un esorcista racconta et Nuovi racconti di un esorcista) – précise la production – sont librement adaptés dans le film. Trop librement, observerons-nous.

La société de production et le réalisateur sont probablement intéressés par l’association « frappante » entre l’exorciste et le célèbre gladiateur d’il y a vingt ans, et non par l’esprit de service qui anime le premier dans son ministère de consolation. L’Église catholique est ensuite représentée par un pape tout aussi invraisemblable, interprété par l’acteur italien Franco Nero. Enfin, les décors du Vatican, peints avec la gamme habituelle et éprouvée de teintes en clair-obscur, donnent au film un effet « Da Vinci Code », pour instiller dans le public le doute habituel : qui est le véritable ennemi ? Le diable ou le « pouvoir » ecclésiastique ?

Concluons ces brèves considérations en évoquant ce que l’on appelle les « effets spéciaux », omniprésents dans tous les films consacrés au thème de la possession diabolique. Comme dans d’autres films, tout est exaspéré, avec des manifestations physiques et verbales frappantes, typiques des films d’horreur.

Or, une telle façon de raconter l’expérience d’exorcisme de Don Amorth, outre qu’elle est contraire à la réalité historique, déforme et falsifie ce qui est réellement vécu et expérimenté lors de l’exorcisme de vrais possédés que nous, exorcistes catholiques, pratiquons selon les directives données par l’Église. En outre, il est offensant pour l’état de souffrance dans lequel se trouvent les personnes victimes d’une action extraordinaire du diable.

Quant au spectateur, que dire ?

L’exorcisme ainsi représenté devient un spectacle destiné à susciter des émotions fortes et malsaines, grâce à une scénographie lugubre, avec des effets sonores qui ne font que susciter l’anxiété, l’inquiétude et la peur chez le spectateur.

Le résultat final est d’instiller la conviction que l’exorcisme est un phénomène anormal, monstrueux et effrayant, dont le seul protagoniste est le diable, dont les réactions violentes peuvent être affrontées avec beaucoup de difficulté ; ce qui est exactement le contraire de ce qui se passe dans le contexte de l’exorcisme célébré par l’Église catholique en obéissant aux directives qu’elle édicte.


Ma réaction au film « l’Exorciste du Vatican »

J’ai visionné le film l’Exorciste du Vatican. Il y a bien sûr l’intrigue, le thriller, qui nous mène dans des arcanes imaginaires ténébreux. Il y a aussi les effets spéciaux dont le cinéaste use et abuse. Faut-il s’en plaindre ? Les cinéphiles sont très habitués à tout cela, à travers de nombreux films qui passent sur nos écrans. D’une certaine façon, ils s’en moquent. Bien sûr, on pourra prendre appui sur cet aspect pour accuser le réalisateur Julius Avery d’en avoir fait un peu trop, et de dénaturer ainsi le ministère de l’exorciste. Mais je ne suis pas sûr que les personnes qui sont dans la salle de cinéma soient dupes.

Je souhaite souligner certains aspects positifs du film

J’en énumérerai quelques-uns, en soulignant que l’exorciste est présenté comme :

* Combattant et assuré de la victoire du Christ ; il me semble que c’est bien notre posture, à nous exorcistes. L’exorciste n’a pas peur, parce qu’il est adossé à sa mission reçue de l’Évêque, et qu’il s’appuie sur la prière de l’Église à travers le rituel qui lui a été remis.

* Conscient que son propre péché peut être un obstacle à son ministère, et une faiblesse s’il n’est pas remis au Christ à travers le sacrement de réconciliation. C’est, je crois, la vérité, et nous veillons à recevoir ce sacrement autant qu’il est possible.

* Informé quant aux manières de faire de son adversaire démoniaque, à travers l’expérience qu’il a acquise ; pour vaincre son adversaire, il faut avoir appris à le connaître. En la matière, cette expérience s’acquiert peu à peu, et elle prend consistance au fil des années.

Il y avait du monde dans la salle de cinéma le jour où j’ai vu le film, et je percevais un certain silence ouvert et accueillant. Après tout, Dieu se sert de tout pour ouvrir les cœurs, et on verra bien s’il y a un retour…

Ce film est-il fidèle au ministère de Dom Gabriele Amorth ?

Je ne suis pas assez compétent pour le dire. L’Association Internationale des exorcistes (AIE) avait mis en ligne dès le mois d’avril un avertissement, en se basant uniquement sur le « trailer » du film. « Une telle façon de raconter l’expérience d’exorcisme de Don Amorth, outre qu’elle est contraire à la réalité historique, déforme et falsifie ce qui est réellement vécu et expérimenté lors de l’exorcisme de vrais possédés que nous, exorcistes catholiques, pratiquons selon les directives données par l’Église. En outre, il est offensant pour l’état de souffrance dans lequel se trouvent les personnes victimes d’une action extraordinaire du diable ».

Mais un trailer n’est pas l’ensemble du film et il se nourrit toujours des aspects les plus spectaculaires. L’AIE a promis une analyse plus circonstanciée à venir.

Ce film reflète-t-il la réalité du ministère d’un exorciste ?

Il est important de rappeler que dans l’Église catholique, c’est l’Évêque qui est exorciste. Il délègue ce ministère à un ou plusieurs prêtres qu’il nomme à cet effet. Le prêtre s’entoure d’une équipe de personnes : laïcs, consacré(e) s, diacres… Il fait la relecture du vécu avec cette équipe et avec l’évêque. Par ailleurs, l’accueil au service de l’exorcisme est très large : chrétiens pratiquants, ou le plus souvent non pratiquants, ou non catéchisés, ou non-baptisés, ou d’autres religions…

La présentation de Dom Amorth comme « l’exorciste en chef du Vatican » est une fiction. Sans doute était-il l’exorciste principal du diocèse de Rome, chargé de coordonner l’ensemble des autres prêtres exorcistes. La posture de « super-exorciste » que le film lui donne oriente son action vers des cas spéciaux et graves, ce qui n’est pas conforme à la réalité du vécu d’un ministère diocésain.

Qu’est-ce que le ministère d’exorciste diocésain ?

Il faut distinguer deux aspects. Ce ministère est fait d’abord et essentiellement de l’écoute de l’ensemble des personnes qui demandent à être reçues, écoute à la fois flottante et « discernante ». Elle se termine par des conseils concernant le combat spirituel, et souvent par une catéchèse adaptée ; et enfin par une prière de libération.

Ensuite, une autre partie de son ministère concerne les cheminements d’exorcisme entrepris avec les personnes réellement possédées. Cela concerne un petit nombre de personnes, mais le cheminement peut durer longtemps. Dans ces cas-là, oui, il peut y avoir des phénomènes d’agitations, de transes, de violences, de cris au niveau sonore incomparable… mais sans effets spéciaux ! Les personnes de l’équipe sont fort utiles pour étoffer la prière au cours de la séance, mais aussi maintenir la personne possédée.

Ce ministère suppose discernement, empathie, humour, patience, compétence (et souci de confrontation avec des compétences complémentaires : médicales, psychologiques, psychiatriques). C’est donc un ministère spécialisé, qui suppose une réelle qualification, souvent acquise sur le terrain, car les formations ou les tuilages sont insuffisants.

Ce ministère nous met en contact, de façon très riche, avec une large frange de la population souvent éloignée de nos communautés chrétiennes, et qui est en réelle souffrance spirituelle. Elle vient frapper à la porte de l’Église (téléphone, sonnette, mail) en flux continu.

Ce sont des personnes qui peuvent venir seules, d’autres en famille, (y compris élargie) ; des parents viennent avec leurs enfants ; des enfants amènent leurs parents ; des personnes amènent leurs ami(e) s. Elles demandent qu’on les aide, qu’on prie avec elles et pour elles, qu’on les libère… Nous les accueillons telles qu’elles sont, là où elles en sont, sans aucun prérequis.

C’est un beau ministère, et il est heureux que la sortie de ce film attire l’attention sur son existence. À charge des lecteurs de penser à prier pour leur prêtre exorciste diocésain et pour les personnes accueillies.

P. Dominique Auzenet, exorciste du diocèse du Mans

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Auteur de « Magnétiseur, guérisseurs, médiums, le nouveau royaume de l’occulte » (Mame)

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